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Soit $X$ un polyèdre. On explique ici comment associer à $X$ des groupes d’homologie $H_i (X)$. Dans la « nature » une variété est toutefois plus souvent décrite comme un quotient de polyèdre que directement réalisée comme un polyèdre (affine). On montre ici que c’est égal à condition de remplacer « cellule » par « classe de cellules » dans les définitions des groupes d’homologie.
Polyèdres et espaces d’identifications
Partant du polyèdre $X$ on expliquer comment former un « espace d’identifications » comme dans le cas plus classique des $3$-variétés.
Une famille $\Phi = \{ \phi_{\alpha} \; | \; \alpha \in J \}$ d’homéomorphismes PL $\phi_\alpha : X_\alpha -> X_{\alpha} '$ entre sous-polyèdres est une famille d’identifications s’il existe une cellulation $K$ de $X$ telle que
- le complexe $K$ induit une cellulation de tous les $X_\alpha$ et $X_\alpha '$ ($\alpha \in J$),
- chaque application $\phi_\alpha$ est affine en restriction à toute cellule $\sigma$ de $K$ telle que $|\sigma | \subset X_\alpha$,
- la famille $\Phi$ est stable par composition et par passage à l’inverse,
- si $\sigma$ est une cellule de $K$ telle que $|\sigma | \subset X_\alpha$ et si $\phi_\alpha (\sigma) \cap \sigma \neq \emptyset$, alors $\phi_\alpha$ est égale à l’application identité en restriction à $\sigma$.
Les différents recollements du cube étudiés par Poincaré ou, plus généralement, les « variétés platoniques » comme la variété dodécaédrique de Poincaré ou la variété dodécaédrique de Seifert-Weber sont des exemples obtenus à partir d’un polyèdre --- un polyèdre platonicien dans ces exemples --- et une famille d’identifications --- identifications des faces opposées dans ces exemples. Le théorème suivant montre que ces espaces quotients sont naturellement homéomorphes à un polyèdre au sens général définit ici.
Si $\Phi$ est une famille d’identifications sur $X$, alors l’espace topologique quotient
$$X/\Phi = X/ \{ \phi_\alpha (x) = x \; | \; x \in X_\alpha , \ \alpha \in J \}$$
est homéomorphe à un polyèdre $Y$ :
$$f : X/ \Phi \stackrel{\cong}{\to} Y$$
de telle manière que, composée avec l’application quotient $q : X \to X/ \Phi$, l’application $f$ est PL.
Pour simplifier on supposera que $X$ est compact. La définition d’une famille d’identifications assure qu’il existe une cellulation $K$ de $X$ telle que pour toute cellule linéaire $\sigma \in K$, la restriction de l’application quotient $q$ à $|\sigma|$ est un homéomorphisme sur son image $q|\sigma|$ dans $X/\Phi$ et que les cellules $e=q|\sigma|$ distinctes munissent $X/\Phi$ d’une structure de CW-complexe. Pour chaque telle cellule $e$ de $X/\Phi$ on choisit une cellule linéaire $\sigma$ de $K$ telle que $q|\sigma | = e$ et on pose $D_e = |\sigma|$ et $\chi_e =q |_{|\sigma|}$ (application caractéristique).
Quitte à subdiviser $K$ on peut supposer $K$ simplicial. Le CW-complexe $X/\Phi$ est alors très particulier en cela que l’on peut supposer qu’il vérifie les deux conditions suivantes. [1]
- Pour toute cellule $e$ l’application caractéristique $\chi_e$ part du simplexe standard $\Delta^k$, avec $k = \dim (e)$.
- Soit $\lambda : \Delta^{\ell} \to \Delta^k$ une application linéaire déterminée par une injection $\{ 0, \ldots , \ell \} \to \{ 0 , \ldots , k \}$ préservant l’ordre. Alors pour toute $k$-cellule $e$ de $X$ il y a une $\ell$-cellule $e'$ de $X$ telle que $\chi_{e'} = \chi_e \circ \lambda$. [2]
Après une subdivision convenable de $K$ on peut en outre supposer que les deux conditions suivantes sont vérifiées. [3]
- Toutes les applications caractéristiques $\chi_e : \Delta^k \to X/\Phi$ sont des plongements.
- Étant donné deux $k$-cellules $e_1$ et $e_2$. Si $\chi_{e_1} (\partial \Delta^k ) = \chi_{e_2} (\partial \Delta^k )$, alors $e_1 = e_2$.
Le CW-complexe $X/\Phi$ est alors combinatoirement isomorphe à un complexe simplicial, pour le réaliser géométriquement il suffit alors de plonger ce complexe abstrait dans un $R^n$, ce que l’on peut évidemment faire si $n$ est suffisamment grand.
C.Q.F.D.
$$ $$
On montre de la même manière le théorème suivant.
Soient $X$ et $Y$ deux polyèdres et soient $B$ un sous-polyèdre de $Y$ et $g:B \to X$ une application PL. Alors le recollement $X \cup_g Y$ a une structure de polyèdre telle que l’application quotient $X \sqcup Y \to X \cup_g Y$ soit une application PL.
Conclusion
Il découle du théorème d’identifications que les groupes d’homologie $H_i (Y)$ peuvent se calculer en considérant le complexe $C_\bullet (X / \Phi )$ où chaque $C_i (X/ \Phi)$ est le $\mathbb{Z}$-module libre engendré par les classes de $i$-cellules modulo $\Phi$ et l’application bord est l’application induite par l’application bord $C_i (K ) \to C_{i-1} (K)$. On peut donc, comme annoncé, calculer les groupes d’homologie de $X/\Phi$ (muni de sa structure naturelle de polyèdre) sans avoir à le subdiviser. Il suffit de remplacer « cellule » par « classe de cellules » dans les définitions des groupes d’homologie.
[1] On dit alors que le CW-complex $X/\Phi$ est un $\Delta$-complexe.
[2] Pour toute cellule $e$ on pourrait s’attend a priori à ce que le choix de $\sigma$ influe sur l’application caractéristique. Mais les $\phi_\alpha$ étant affines en restriction aux cellules de $K$, il n’en est rien.
[3] C’est parfois ce que l’on appelle un complexe simplicial dans dans la littérature.