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Imaginons un paysage montagneux : les composantes connexes des lignes de niveau de la fonction altitude sont en général des courbes réduites à des points, des courbes simples fermées ou des courbes fermées ayant un point double.
Le film suivant montre un tel paysage montagneux (disons plutôt une surface cabossée) qui progressivement se retrouve submergé par les eaux : des changements de la topologie des lignes de niveau apparaissent de temps à autre, ainsi que des points remarquables : ce sont les points critiques de la fonction altitude, c’est-à-dire les points où la différentielle de la fonction s’annule.
Nous allons maintenant illustrer sur un exemple les idées principales de la théorie de Morse.
Considérons donc un tore $T$ (rappelons qu’il s’agit d’une surface compacte connexe sans bord de genre 1) posé verticalement sur un plan puis légèrement incliné, ainsi que la fonction altitude par rapport à ce plan.
Quatre points remarquables sont notés sur le film suivant : $P$ (d’altitude nulle), $Q$, $R$ et $S$ (d’altitude maximale).
On se convainc facilement que ce sont les points critiques de la fonction altitude : la topologie des lignes de niveau change en ces points au fur et à mesure de la montée des eaux...
Notons $f:T \longrightarrow \mathbf{R}$ la fonction altitude au-dessus du plan et $T^a = \{x \in T;\ f(x)\leq a\}$ l’ensemble des points de $T$ d’altitude inférieure ou égale à $a$.
Nous remarquons que $T^a$ est :
- vide pour $a<0$ ;
- homéomorphe à un disque si $a$ est une altitude comprise strictement entre celles de $P$ et $Q$ ;
- homéomorphe à un cylindre si $a$ est une altitude comprise strictement entre celles de $Q$ et $R$ ;
- homéomorphe à une surface compacte connexe de genre 1 dont le bord est un cercle si $a$ est une altitude comprise strictement entre celles de $R$ et $S$ ;
- le tore $T$ si $a$ est une altitude strictement supérieure à celle de $S$.
Les changements de topologie (resp. de type d’homotopie) d’un cas à l’autre s’expriment en termes d’attachements d’anse (resp. de cellules).
Étant donnée une variété à bord $M$ de dimension $n$, un entier $k$ compris entre $0$ et $n$ et un plongement de $\partial D^k\times D^{n-k}$ dans $\partial M$, le résultat de l’opération d’attachement d’une $k$-anse à $M$ selon ce plongement est la variété quotient obtenue par réunion disjointe de $M$ et de $D^k\times D^{n-k}$ modulo l’identification de tout point de $\partial D^k\times D^{n-k}$ avec son image par le plongement. Par convention, attacher une $0$-anse à $M$ consiste à faire la réunion disjointe de $M$ avec une boule.
Par cellule de dimension $n\geq 1$, on désigne tout espace topologique homéomorphe à la boule unité fermée de $\mathbf{R}^n$ (et par cellule de dimension $0$ un espace réduit à un point).
Étant donné un espace topologique $E$, une cellule de dimension $n$ et une application continue du bord de cette cellule (homéomorphe à la sphère de dimenson $n-1$) dans $E$, le résultat de l’opération d’attachement est l’espace topologique quotient obtenu par réunion disjointe de $E$ et de la cellule de dimension $n$ modulo l’identification de tout point du bord de la cellule avec son image par l’application continue.
Par convention, attacher une cellule de dimension 0 à $E$ n’est rien d’autre que faire la réunion disjointe de $E$ avec ce point.
- $1\rightarrow 2$ : Passer du vide à un disque fermé revient, topologiquement parlant, à attacher une $0$-anse (de dimension $2$) à l’ensemble vide. Homotopiquement parlant, le disque n’étant pas distinguable d’un point, cela revient à attacher au vide une cellule de dimension $0$.
- $2\rightarrow 3$ : Passer du disque au cylindre c’est, topologiquement parlant, attacher une $1$-anse au disque et, homotopiquement parlant, lui attacher une cellule de dimension 1.
- $3\rightarrow 4$ : Passer du cylindre à une surface compacte connexe de genre 1 dont le bord est un cercle, c’est, topologiquement parlant, attacher une nouvelle $1$-anse et, homotopiquement parlant, attacher une nouvelle cellule de dimension 1 au cylindre.
- $4\rightarrow 5$ : La reconstruction de notre tore $T$ est finalement achevée dans une dernière étape en attachant une $2$-anse (resp. une cellule de dimension 2) à la surface à bord obtenue précédemment.
Dans un premier temps, la théorie de Morse généralise à toutes les variétés différentielles ce que nous venons de voir et c’est par cela que nous allons donc commencer.