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Suite exacte de Mayer-Vietoris pour la cohomologie de de Rham

Soit $U_1$ et $V_2$ deux ouverts recouvrant $M$. La suite exacte de Mayer-Vietoris permet de relier la cohomologie de $M$ à celle des trois ouverts $U_1$, $U_2$ et $U_1 \cap U_2$.

Théorème (Suite exacte de Mayer-Vietoris en cohomologie de de Rham)

Soit $U_1$ et $U_2$ deux ouverts recouvrant une variété $M$. Pour $k\in \{1,2\}$, on note $i_k : U_k \hookrightarrow M$ et $j_k : U_1 \cap U_2 \hookrightarrow U_k$ les inclusions. On a alors une suite exacte longue

$$\xymatrix{ \cdots \qquad \ar[rr]^{(i_1^*, i_2^*)} & & \mathrm{H}_{\mathrm{dR}}^{p-1}(U_1) \oplus \mathrm{H}_{\mathrm{dR}}^{p-1}(U_2) \ar[rr]^{j_1^* - j_2^*} && \mathrm{H}_{\mathrm{dR}}^{p-1}(U_1 \cap U_2) \ar[lllldd]_{\delta}\\ &&&&\\ \mathrm{H}_{\mathrm{dR}}^p(M) \ar[rr]^{(i_1^*, i_2^*)} && \mathrm{H}_{\mathrm{dR}}^p(U_1) \oplus \mathrm{H}_{\mathrm{dR}}^p(U_2) \ar[rr]^{j_1^* - j_2^*} && \mathrm{H}_{\mathrm{dR}}^p(U_1 \cap U_2) \ar[lllldd]_{\delta}\\ &&&&\\ \mathrm{H}_{\mathrm{dR}}^{p+1}(M) \ar[rr]^{} && \mathrm{H}_{\mathrm{dR}}^{p+1}(U_1) \oplus \mathrm{H}_{\mathrm{dR}}^{p+1}(U_2)\ar[rr]^{} &&\qquad \qquad \cdots }$$

Démonstration. On va démontrer que pour tout $p$, la suite

$$ 0 \to \Omega^p(M) \xrightarrow{(i_1^*, i_2^*)} \Omega^p(U_1) \oplus \Omega^p(U_2) \xrightarrow{j_1^* - j_2^*} \Omega^{p}(U_1 \cap U_2) \to 0$$

est exacte. Le théorème en découlera alors par la propriété générale des suites exactes de complexes.

Le rappel d’une forme par une inclusion $i : U \hookrightarrow V$ n’est rien d’autre que sa restriction de $V$ à $U$. Cela entraîne directement l’injectivité de $(i_1^*, i_2^*)$ (une forme $\alpha \in \Omega^p(M)$ est déterminée par sa restriction à deux ouverts recouvrant $M$) et le fait que $\ker(j_1^* - j_2^*) = \mathrm{im}(i_1^*, i_2^*)$ (si deux formes $\alpha_i \in \Omega^p(U_i)$ coïncident sur l’intersection $U_1 \cap U_2$, on peut les recoller pour obtenir une forme globale). Il ne reste donc qu’à montrer la surjectivité de

$$ j_1^* - j_2^* : \mathrm{H}_{\mathrm{dR}}^p(U_1) \oplus \mathrm{H}_{\mathrm{dR}}^p(U_2) \to \mathrm{H}_{\mathrm{dR}}^p(U_1 \cap U_2).$$

Pour ce faire, on admettra le résultat suivant de topologie différentielle.

Partition de l’unité pour deux ouverts

Soit $U_1$ et $U_2$ deux ouverts recouvrant la variété $M$. Alors il existe une partition de l’unité subordonnée au recouvrement $(U_i)$, c’est-à-dire un couple de fonctions lisses $(f_1, f_2)$ telles que $\mathrm{supp}\, f_i \subset U_i$ et $\forall x \in M, f_1(x) + f_2(x) = 1.$

Soit alors $\alpha \in \Omega^p(U_1 \cap U_2)$ une forme différentielle. Puisque $f_1$ s’annule au voisinage de $U_2 \setminus U_1$, la forme $(f_1)_{|U_1 \cap U_2} \alpha$ s’étend (par la forme nulle) en une forme bien définie $\alpha_2 \in \Omega^p(U_2)$. De la même façon, $(f_2)_{|U_1 \cap U_2} \alpha$ s’étend en une forme $\alpha_1 \in \Omega^p(U_1)$ et l’on a bien

$$ (j_1^* - j_2^*)(\alpha_1, - \alpha_2) = \left( (f_1)_{|U_1 \cap U_2} + (f_2)_{|U_1 \cap U_2} \right) \alpha = \alpha,$$

ce qui prouve que la flèche $j_1^* - j_2^*$ est surjective et conclut la preuve du théorème.

C.Q.F.D.

$$ $$

En guise d’application de la suite de Mayer-Vietoris, démontrons le résultat suivant.

Théorème (Finitude de la cohomologie de de Rham)

Soit $M$ une variété compacte. Alors $\mathrm{H}_{\mathrm{dR}}^*(M)$ est un espace vectoriel de dimension finie.

Démonstration. On admet le théorème suivant, qui est une conséquence de l’existence de métriques riemanniennes.

Théorème (Existence de bons recouvrements)

Soit $M$ une variété compacte de dimension $n$. Alors $M$ admet un bon recouvrement fini, c’est-à-dire un recouvrement ouvert $(V_i)_{i=1}^\kappa$ tel que les intersections multiples $V_{i_1} \cap \cdots \cap V_{i_m}$ sont soit vides soit difféomorphes à $\mathbb{R}^n$.

On va alors démontrer notre théorème par récurrence sur le cardinal $\kappa \in \mathbb N$ d’un tel bon recouvrement.

Si $\kappa = 1$, $M$ est difféomorphe à $\mathbb{R}^n$. On a vu que cela entraînait que

$$ \mathrm{H}_{\mathrm{dR}}^*(M) = \mathrm{H}_{\mathrm{dR}}^0(M) = \mathbb{R}$$

et donc le résultat.

Supposons donc le résultat démontré pour toutes les variétés admettant un bon recouvrement de cardinal $< \kappa$ et soit $(V_i)_{i=1}^\kappa$ un bon recouvrement de $M$. On écrit $U_1 = V_1$ et $U_2 = V_2 \cup \cdots \cup V_\kappa$. Remarquons que le recouvrement $(V_1 \cap V_i)_{i=2}^\kappa$ de $U_1 \cap U_2$ est bon. Par hypothèse de récurrence, $\mathrm{H}_{\mathrm{dR}}^*(U_1)$, $\mathrm{H}_{\mathrm{dR}}^*(U_2)$ et $\mathrm{H}_{\mathrm{dR}}^*(U_1 \cap U_2)$ sont de dimension finie.

D’après la suite exacte de Mayer-Vietoris, le fait que les espaces vectoriels $\mathrm{H}_{\mathrm{dR}}^{p-1}(U_1 \cap U_2)$ et $\mathrm{H}_{\mathrm{dR}}^p(U_i)$ soient de dimension finie entraîne qu’il en va de même de $\mathrm{H}_{\mathrm{dR}}^p(M)$, ce qui conclut la preuve.

C.Q.F.D.