Dans cette partie nous allons parler du lien entre la cohomologie de de Rham et la cohomologie simpliciale à travers la preuve du Théorème de de Rham. On va montrer que sur une variété triangulée et lisse $V$, il existe une application naturelle entre les formes différentielles réelles et les cochaines simpliciales à valeur dans $\mathbb{R}$. Cette application va descendre en cohomologie, et induira un isomorphisme d’espace vectoriel entre le $\ell$-ième espace de cohomologie de de Rham $H_{dR}^{\ell}(V)$ et le $\ell$-ième groupe de cohomologie $H^{\ell}(V,\mathbb{R})$ pour tout $\ell$.
Énoncé du Théorème.
On se place dans le cadre suivant. Soit $V$ un variété qui admet une triangulation lisse, c’est-à-dire qu’il existe un complexe simplicial $X$ et un homéomorphisme $f: X \to V$, telle que, la restriction de $f$ à n’importe quel simplexe de $X$ est un plongement lisse dans $V$.
Soient $w$ une $\ell$-forme lisse sur $V$ et $s$ un $\ell$-simplexe de $X$, on définit alors l’application $\int_{\ell}$ de la façon suivante,
$$\int_{\ell}(\omega) (s) = \int_{s} f^*\omega,$$
où $f^*\omega$ est le tiré en arrière de la forme $\omega$ par l’application $f$. On peut prolonger $\int_{\ell}$ linéairement en une application entre $C_{dR}^{\ell}(V)$ et $C^{\ell}(V,\mathbb{R})$.
L’application $\int_{\ell}$ passe au quotient en une application linéaire entre $H_{dR}^{\ell}(V)$ et $H^{\ell}(V,\mathbb{R})$ que nous noterons de la même façon.
Démonstration. Pour montrer cela il suffit de vérifier que pour tout $\ell \in \mathbb{N}$ et pour toute $\ell$-forme $\omega$, $\int_{\ell+1} d\omega = \partial^* \int_{\ell} \omega$. Montrons que cette égalité est vraie pour chaque $\ell+1$-simplexe $s$ de $X$. On a :
$$\begin{array}{rcl} (\int_{\ell+1} d\omega) (s) & = & \int_{s}f^*(d\omega), \\ & = & \int_{s} df^*(\omega), \end{array}$$
et par le Théorème de Stokes,
$$\begin{array}{rcl} (\int_{\ell+1} d\omega) (s) & = & \int_{\partial s} f^*(\omega),\\ & = & (\int_{\ell} \omega) (\partial s),\\ & = & (\partial^* \int_{\ell} \omega) (s). \end{array}$$
Le théorème de de Rham est alors le résultat d’isomorphisme suivant :
Pour tout $\ell \in \mathbb{N}$, l’application $\int_{\ell}$ entre $H_{dR}^{\ell}(V)$ et $H^{\ell}(V,\mathbb{R})$ est un isomorphisme.
Pour montrer cet isomorphisme, nous procédons en deux temps. Tout d’abord nous verrons que l’application $\int_{\ell}$ est surjective en construisant un inverse à droite, puis nous prouverons l’injectivité de $\int_{\ell}$. Ces deux propositions ne sont pas totalement indépendantes, dans la preuve de l’injectivité on va utiliser l’inverse à droite construit dans la première proposition. Nous conseillons donc vivement au lecteur de les lire dans l’ordre proposé.
Enfin, nous concluons la discussion autour du théorème de de Rham par une version PL, analogue qui permet notamment de travailler avec des coefficients rationnels et non réels.