Henri Poincaré utilise le lemme de Morse sans même ressentir le besoin de le justifier. Ce lemme est-il à ce point évident ? On peut tenter de « reconstruire » l’argument qui a pu faire penser à Poincaré que ce lemme devait être vrai, et… facile. Plaçons-nous en dimension $2$ par exemple, et prenons une fonction $f(x,y)$ qui présente un point critique à l’origine. Par une transformation linéaire, on peut réduire la partie quadratique du développement de Taylor (i.e. la Hessienne) à une somme (ou une différence) de carrés. Si on suppose la Hessienne non dégénérée, elle se réduit donc à $\pm x^2 \pm y^2$.
Etudions l’effet du changement de coordonnées
$$(x,y) \mapsto (x+p(x,y),y+q(x,y))$$
où $(p,q)$ sont des polynômes homogènes de degré 2, sur la fonction $\pm x^2 \pm y^2$. On trouve
$$\pm x^2 \pm y^2 + 2 (\pm x p(x,y) \pm y q(x,y))+ …$$
Evidemment, tout polynôme homogène de degré 3 peut s’écrire sous la forme $\pm x p(x,y) \pm y q(x,y)$ en choisissant convenablement $p,q$. Par un changement de variables, il est donc évident qu’on peut se débarrasser des termes de degrés 3. Par le même argument, on se débarrasse des termes de degrés 4, etc… On rappelle que Poincaré suppose souvent implicitement que les fonctions qu’il étudie sont analytiques. Il est « raisonnable » de penser que le processus qu’on vient de décrire converge, et que ceci est une « preuve » du lemme de Morse, qui est donc « évident ».
Quelques exercices :